Le paludier. Ar paluder. Le sâonié.

 

 

Ce mot nous vient de la palud, qui désigne une zone marécageuse en bordure de mer. C'est en effet sur ces lieux que des hommes et des femmes ont aménagé un incroyable système pour récolter le sel. Pardon, pour le cueillir. Ce n'est pas n'importe quelle marchandise, même si son importance  au cours de l'histoire n'est plus très bien perçue en notre période de facilité et d'insouciance.

 Autrefois les marais salants étaient beaucoup plus répandus en Bretagne, mais, actuellement, il ne reste guère que la région de Guérande, Batz sur mer et Saillé qui continue cette activité.

Lors d'une forte marée, le paludier ouvre une trappe qui va permettre à l'eau de mer de rejoindre une vasière en empruntant un canal profond: l'étier.

Elle y séjournera de 15 à 30 jours afin que la vase décante. Elle rejoindra ensuite un cobier qui servira de réservoir pour alimenter la saline. Puis elle passe dans les adernes, les derniers chauffoirs, d'où elle rejoint par un canal nommé guiffre ou délivre les oeillets.

Ce sont des bassins rectangulaires d'une dizaine de mètres sur sept où la profondeur de l'eau est inférieure à cinq centimètres. Ils sont séparés par de petites levées de terre au milieu desquelles se trouve une plate-forme circulaire: la ladure.

Parfois, il y a cristallisation à la surface de l'eau: c'est la fleur de sel que l'on cueille à l'aide d'une sorte de râteau, la lousse.

Le gros sel est, quant à lui, "troussé" avec un las, une planche d'un mètre vingt fixée sur un manche de 5 à 6 mètres de longueur. Et c'est tout l'art du paludier de décoller le gros sel sans soulever la vase.

Le sel est déposé sur la ladure pour qu'il s'égoutte. Le lendemain, les femmes le porteront sur leur tête couronnée d'une torche (un linge enroulé) dans des gèdes jusqu'au mulon, l'énorme tas de sel qui regroupe toute la récolte.

La troque.

Lorsque la saison ne permettait pas de récolter le sel, ni de s'occuper du marais, entre novembre et février, les paludiers partaient troquer , c'est à dire échanger leur sel contre du grain, dans le reste de la Bretagne. Ils s'organisaient en petites caravanes, avec des mules chargées de sacs de sel mais aussi d'oignons. Comme la langue bretonne s'est maintenue pratiquement jusqu'au début du XXème siècle en presqu'île guérandaise, les sauniers n'avaient pas de difficultés à communiquer.

Bien sûr, ce système ne permettait pas d'écouler toute la production. Une grande partie était expédiée par bateaux dans le reste de la France, surtout vers le nord.